Robert Joubin, metteur en
scène, responsable du pôle théâtre de Quimper, a puisé dans un
récent voyage à Epidaure l'envie de montrer à quoi sert le théâtre
dans la cité. Comme son homologue de l'antiquité, il se trouve dans
le rôle du professionnel qui met en mouvement des comédiens
amateurs.
Complexes, cruelles, à
la manière de la tragédie grecque dont elles s'inspirent, il s'agit
de faire vivre les relations entre individus sous le prisme coloré
de la condition humaine et de se poser une question : nos
besoins ont-ils changé depuis 2500 ans ?
L'envie d'aimer, d'être
aimé, l'inadaptation à la relation amoureuse sont au cœur de la
tragédie contemporaine créée collectivement par douze acteurs
amateurs qu'il accompagne, tous habitant le quartier du Moulin Vert.
Il s'agissait, dimanche 8 juin 2014, au Théâtre Max Jacob de Quimper, du
premier tableau d'une trilogie. Les deux suivants évoqueront les
thèmes de l'emprise, puis du pouvoir, avec vingt deux autres
comédiens qui viennent, eux, du quartier de Kerfeunteun.
« Ce sont, souligne
le metteur en scène, trente quatre personnes qui habitent Quimper et
les alentours et témoignent d'une certaine vision de la vie. Ces
gens-là, à notre époque, sur ce thème-là, dans cette ville, à
cet endroit, en 2014. »
Si la vraisemblance, la
pertinence des situations conflictuelles, la manière réaliste dont
chaque acteur habite son personnage percute la sensibilité du
spectateur, c'est à la singularité du processus de création que le
public le doit. Après étude de pièces antiques dès la rentrée de
septembre, chaque comédien a choisi un personnage, l'a fait évoluer
sur un travail de plateau. Improvisation et observation de ce qu'il
se passe dans les corps qui se côtoient.
« On sait, développe
Robert Joubin, si les acteurs sont présents et s'il y a une relation
à l'autre qui est en jeu. Cela a du sens. Ce n'est qu'ensuite,
qu'est venue, comme allant de soi, en février, l'écriture des
dialogues. D'autres acteurs (qui seront sur scène, en second plan,
des récitants habillés de noir) imaginent, avant de connaître
l'histoire réelle, ce que ressent la personne à l'intérieur de sa
présence à l'autre, et l'écrivent. Ils ont perçu l'essentiel et
ça marche ! »
Avec le public aussi cela
fonctionne. Les saynettes s'enchaînent. Un enseignant désabusé,
pris à partie par une mère d'élève, distille avec l'art consommé
du second degré, un fatalisme assumé. On vit encore une scène de
confidences entre hommes interrogeant le ressort d'une relation
amoureuse : amour ou pulsion de reproduction ?
Faire jouer les habitants
du lieu, c'est peut-être simplement pour Robert Joubin, comme à
l'époque antique, contribuer à trouver du sens à la vie ? La
pièce aurait pu se jouer à Epidaure...
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